LES CHRONIQUES DE COD: Préserver la Cohésion Sociale : Ne laissons pas le Débat sur le Voile Diviser l’École Sénégalaise

  1. La question du voile et de la confession dans les établissements scolaires sénégalais est aujourd’hui au centre de discussions qui, malheureusement, menacent de diviser un pays qui a toujours su préserver son unité. Depuis l’indépendance, le Sénégal a maintenu une cohabitation harmonieuse entre ses différentes communautés religieuses, et cela s’est traduit, entre autres, par une intégration sereine au sein du système éducatif. Les missions catholiques, en particulier, ont été des lieux où se sont formés de nombreux cadres et intellectuels sénégalais, sans que la question de la religion ne soit un obstacle. Alors pourquoi alimenter un débat aussi stérile et dangereux aujourd’hui ?

Le débat actuel sur le voile dans les écoles est symptomatique d’une communication mal maîtrisée par sa cible, notamment depuis que le Premier ministre Ousmane Sonko a abordé cette question publiquement. Pourtant, il n’y avait aucune nécessité d’en faire une polémique. L’école sénégalaise, qu’elle soit publique ou privée, a toujours su gérer ce genre de situations de manière discrète et respectueuse. Ces différences ont été traitées de manière souterraine, sans vexer ni offenser quiconque. En vouloir faire un sujet de tension publique risque de saper la cohésion nationale.

Je tiens à témoigner de mon expérience personnelle à ce sujet. Mes parents et mes frères ont fréquenté la mission catholique de Ndiaganiao, l’école Marie Médiatrice. Ce passage a été un tremplin pour eux, leur offrant une éducation de qualité et les préparant à une carrière brillante. Je ne peux évoquer cette école sans rendre un vibrant hommage à Sœur Rose Hélène. Plus qu’une simple enseignante pour mon aîné et ami Pape Alou Diouf, elle a été une mère pour nous, orientant nos pas avec amour et bienveillance. Récemment, lors de notre retrouvaille à l’aéroport international Blaise Diagne, elle m’a confié que sa plus grande récompense était de voir un de ses élèves grandir et devenir un homme responsable. Ces mots résonnent en moi comme un appel à préserver cet esprit de solidarité et de respect mutuel qui a toujours caractérisé notre société.

En ce qui concerne l’affaire de l’élève renvoyé de l’école Sainte Bernadette à cause du voile, il est important de replacer les choses dans leur contexte. J’ai moi-même été renvoyé de l’école à cause d’un refus de porter la blouse, car j’étais en Baye Lahaat. Ce jour-là, mes parents m’ont sanctionné et renvoyé à mes études. Cela montre que ces situations ne sont pas nouvelles et qu’elles doivent être traitées avec sagesse. Il ne s’agit pas de brimer qui que ce soit, mais de respecter les règles établies tout en maintenant la cohésion sociale.

Aujourd’hui, nous voyons des sujets aussi sensibles que la confession être débattus sur la place publique, comme ce fut le cas avec la lettre de l’Abbé André Larry Ndiaye aux nouveaux gouvernants. Cette lettre a suscité des réactions vives, certaines franchissant le rubicon de notre cohésion sociale. Pourtant, chrétiens, musulmans et païens ont toujours partagé des repas, des moments de vie, des mariages mixtes, sans que cela ne pose problème. À Ndiaganiao, par exemple, nous avons toujours vécu ensemble dans la paix et l’harmonie. La plupart de mes oncles maternels, comme, Léon Diop, Benoit Diop, Antoine Birane Ndour, Martin Thilaw Ndour, ainsi que mes tantes, penda Ndiabou, Ndeye Ivone Diop …sont chrétiens, Cette fraternité a toujours été présente dans nos familles, et ces exemples de cohabitation pacifique sont nombreux à travers tout le Sénégal.

Aujourd’hui plus que jamais, il est impératif de cultiver la paix et de renforcer cette cohésion sociale qui fait la force du Sénégal. Ne laissons pas des débats de bas étage détruire ce que nos ancêtres ont construit avec tant de sagesse. Nguir Rog fa Khamad Sen, fa gone la fapfana , fa ou yef tedola, fa bengaa , préservons notre vivre-ensemble, notre fraternité et notre unité nationale. Que chacun prenne conscience de l’importance de ce sujet et de la nécessité d’en parler avec responsabilité.
Cheikh Ousseynou Diouf, journaliste de formation , Chroniqueur , communicant , Ingénieur urbaniste et aménagiste , spécialiste en communication territoriale…

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